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2014 09 08 Le Monde, Géraldine Rué : ma première randonue

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(@apnel)
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Posts: 6681
Début du sujet  

Source : http://voyages.blog.lemonde.fr/2014/09/08/ma-premiere-randonue/

Ma première randonue

Je l’avoue, je n’aurais jamais osé me présenter seule au rendez-vous fixé à 11 heures 30 sur ce quai de gare de l’Essonne. Un ami journaliste m’accompagne, l’expérience me fait moins peur. C’est en fait à cause de lui que je suis là, il est convaincu que ce sujet sur lequel il a déjà beaucoup écrit serait original pour le blog. Souvent en voyage, j’avais pu jusqu’ici décliner sans peine ce qui pour moi est un véritable défi. Mais cette fois, je ne peux plus reculer. Je vais participer à ma première « randonue ».

Jacques Freeman est à l’heure. Freeman est son pseudonyme, un nom bien choisi pour cet homme qui, jusqu’ici encore habillé, porte une jupe à velcros sans se soucier du regard des autres. « Je suis content, personne n’a l’air de remarquer ma tenue, souligne-t-il quand même. J’aime porter cette jupe en randonue car elle est facile à enlever et à remettre lorsque nous croisons des textiles », termine-t-il. Le « textile » désigne une personne habillée, je découvre peu à peu tout un lexique qui m’était alors étranger. Le mot randonue est suffisamment explicite pour que je n’en détaille pas le sens mais les « nudiens » qui y participent ne sont pas à confondre avec leurs cousins naturistes : pas question pour eux de s’enfermer dans des endroits privés et cloisonnés, la nudité dans un lieu public est un droit qu’ils revendiquent.

« Dans les centres naturistes, les codes sociaux sont pires qu’à l’extérieur ! », déplore Jacques. « Les naturistes ont tellement l’impression d’être persécutés qu’ils se restreignent eux-mêmes ! » Déçu par l"expérience, il fonde en 2005 l’APNEL, l’association pour la promotion du naturisme en liberté. « L’APNEL compte aujourd’hui quelques 200 membres et a pour principal objectif de réunir des naturistes mais surtout de défendre leur droit à la nudité », explique-t-il, n’hésitant pas à citer le code pénal pour appuyer son discours : la loi 251 est contre la discrimination de l’apparence physique dont ils sont justement victimes.

Plus tard, nous retrouvons sur un parking les autres participants de la randonnée dont l’itinéraire reste encore inconnu. Jacques fixe toujours ainsi ses rendez-vous : « La petite annonce est impossible car sinon, les gendarmes sont là ! Grâce à internet, il est plus facile se regrouper entre nous mais je demande toujours aux nouveaux arrivants de me laisser un numéro de téléphone pour les contacter. J’ai quand même besoin de savoir à qui j’ai à faire ! » Je fais la connaissance de Sylvie la présidente de l’association, et des autres randonneurs. L’APNEL organise des marches dans la forêt de Fontainebleau et de Chantilly mais celle d’aujourd’hui nous conduit à une carrière où il est possible de prendre des bains de boue.

Je ne redoute pas le moment fatidique, je suis autorisée à rester habillée. Mais quand la marche débute enfin, j’avoue demander à mon ami H. à quel moment tout le monde se déshabille. Jacques n’arrachera sa jupe qu’après avoir emprunté un chemin de traverse, invitant les autres à faire de même. A partir de cet instant, les échanges passent désormais pour moi en mode « conversation difficile ». Je ne sais plus comment je dois regarder les gens en m’adressant à eux. J’ai autant peur de les fixer lourdement dans les yeux que d’avoir l’air de jeter une œillade indiscrète sur leur sexe. Je suis en plus la seule à être gênée. « Une femme est plus attirante en mini-jupe que nue car les vêtements sexualisent le corps, dit Jacques qui rentre dans le vif du sujet. Les hommes qui viennent au début ont parfois peur d’avoir une érection mais ils réalisent très vite que l’ambiance est complètement désérotisée. Nous faisons des choses du quotidien nu, ça n’a rien à voir avec un naturisme "déviant" comme dans certains lieux réservés à ça. »

Tous associent la randonue à une quête de liberté et un besoin retour aux sources : « Il n’y a plus de code vestimentaire, nous sommes humain face à humain et ça joue sur les relations car beaucoup de réactions sont dictées par les codes sociaux. En nous mettant à nu, nous revenons à l’essentiel », explique l’un d’entre eux souhaitant rester anonyme. Pas par honte mais parce que sa femme a du mal à comprendre son goût pour le naturisme. Pendant longtemps il a même été contraint d"élaborer des stratégies d’adultère pour participer aux réunions de l’APNEL.

Réunis autour de ce même besoin, tous y sont arrivés par des chemins différents : Jacques avoue un goût pour toute forme de transgression, ce qui lui a d’ailleurs couté une condamnation à 3 ans de prison pour insoumission lorsqu’il faisait l’armée. L’histoire de Sylvie est plus complexe. Atteinte de polyarthrite depuis son plus jeune âge, le naturisme lui a permis de se réconcilier avec un corps marqué par les cicatrices d’opérations successives.

Toujours accompagnée de mon ami H., Jacques et Sylvie me proposent d’assister le lendemain à leur assemblée générale qui se tient dans un des sièges de la FFN, la fédération française de naturisme. Ce rassemblement annuel réunit des nudiens de la France entière mais aussi de Nouvelle-Zélande et de Belgique. Après avoir évoqué divers points importants comme l’organisation de certaines activités ou encore des frais liés à l’achat billets de train pour se rendre à certains procès, le Belge Jérôme Jolibois prend la parole pour partager ses expériences de naturisme urbain. Arrêté à trois reprises, son militantisme lui a permis de se faire une petite notoriété dans Bruxelles : il parvient désormais à participer à divers types de soirées comme des concerts, pièces de théâtre, cocktails ou simples barbecues en étant nu ! Son discours permet à tous de prendre la mesure des progrès à faire sur les mentalités en France.

J’ai jusqu’ici contourné le sujet et vous vous demandez sûrement si je me suis déshabillée ou pas… Et bien non ! Vous auriez préféré que j’aie une véritable révélation en me mettant nue, je sais, cette fin d’histoire est bien décevante !

Et bien sûr, je n’écris pas cette version pour faire plaisir à mon père….

Ce message a été écrit par : jfreeman.


   
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(@apnel)
Membre
Inscription: Il y a 2 ans
Posts: 6681
Début du sujet  

Le récit est vraiment agréable à lire et il n"y a rien à redire aussi bien sur le fond que sur la forme.

Un grand bravo à Géraldine pour son article et quant au fait qu"elle soit restée habillée, c"est surtout dommage pour elle ;-).

Ce message a été écrit par : BAREFOOTER.


   
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(@apnel)
Membre
Inscription: Il y a 2 ans
Posts: 6681
Début du sujet  

Effectivement dommage que la journaliste ne se soit pas dénudée, mais d"un autre côté, cela ne contribue-t-il pas à la banalisation de la nudité et au respect mutuel ? En tout cas, il n"y a aucun commentaire sur le blog du Monde. On est bien loin de la diabolisation de nos activités nudiennes. Les lecteurs du Monde seraient-ils plus tolérants et ouverts ?.

Ce message a été écrit par : marci.


   
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